Rome à Paris : glaive et globe

2 décembre 2010 par dcolas

Le point de départ de cette recherche (voir la page d’entrée de ce blog) est un débat, trop bref, que j’ai eu avec Quentin Skinner : sur une gravure de Rubens une femme qui tient un bâton de commandement et un gouvernail a sur ses genoux une sphère. Je l’avais interprétée comme le symbole de la vocation globale du port d’Anvers, une ville-monde. C’est dans cette ville que  fut édité le livre pour lequel Rubens a gravé un frontispice, où se trouve  la Politica. Pour Skinner le globe dans ce type de représentations est l’allégorie de la Fortune. (voir la gravure de Dürer dans le blog du 16/10/2010).

Rubens, Frontispice des Oeuvres de Juste Lipse, détail, Politica, (Cliché BN)

Mais la façade du Grand Palais à Paris (évidemment à une autre époque que celle à laquelle pense Skinner) montre une statue de Rome qui va dans le sens de mon interprétation du globe comme symbole de la puissance politique. Du sud au nord la façade du Grand Palais comporte une série de mosaïques et de sculptures symbolisant les grandes époques de l’histoire de l’art selon un ordre grossièrement chronologique.  Donc après l’Egypte et Atbènes, Rome.

Paris Façade du Grand Palais, en haut du mur du péristyle, mosaïque montrant les artistes romains (Cliché D. Colas)

La statue qui représente Rome a un diadème sur la tête, à la façon d’une impératrice. Elle montre sa poitrine dénudée, ce qui est moins conforme au modèle romain de représentation d’impératrice. Et; dans la main droite, elle brandit un glaive, mais bizaremment par la lame ce qui annule l’agressivité de cette arme (par contraste la sculpture de Carpeaux blog du 15/11/2010). Sur son côté gauche : le chapiteau d’une colonne ionique sur lequel repose un globe qu’elle maintient d’une main. Sur l’arc de Constantin, prés du Colisée,  l’empereur, assis, tient un bâton de commandement et il a dans la main, paume vers le ciel, une sphère symbolisant son pouvoir universel (voir le blog du 30/07/2010). Le globe de la statue du Grand Palais est aussi la marque d’un empire total. Et du même coup le glaive n’a plus grand sens : il rappelle le principe de la conquête mais celle-ci accomplie il n’a plus d’utilité. Et la porteuse triomphante de glaive n’a pas assez de force pour tenir sur ses genoux le globe : l’art vient à son secours.

Paris façade du Grand-Palais, Rome

 
 
 

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